Matière à Fiction

.75 Biométrie fantastique

(2025-08-30, François Houste)

Les protestations du jeune homme résonnèrent dans tous le hall de l’aéroport.

Mais enfin ! C’est inadmissible. Vous ne savez donc pas qui je suis ?

Derrière lui, la file d’attente des voyageurs qui attendaient pour accéder à la zone d’embarquement commençait à s’allonger. Et leur mécontentement à s‘exprimer de plus en plus clairement. Mais pourquoi ça n’avance pas ? Qu’est-ce qu'il se passe ? C’est qui ce type ? Non, mais, il peut pas se pousser ? Font chier ces jeunes, y’en a qui aimeraient bien avancer !

Le fonctionnaire de la douane leva à nouveau ses yeux las de l’écran de l’ordinateur et répéta dans après un long soupir.

Monsieur, encore une fois, je vous demande de vous calmer. L’ordinateur refuse de valider votre passeport. Je vais, encore une fois, vous demander, de bien vouloir vous mettre sur le côté afin de laisser passer les autres passagers. Ne m’obligez pas à appeler la sécurité de l’aéroport.

J’ai une carte d’embarquement prioritaire ! protesta à nouveau l’individu.

Cela n’ n’a rien à voir, soupira le douanier. Ici, ce n’est pas la zone d’embarquement, ce sont les contrôles d’identité. Mettez-vous sur le côté, s’il-vous-plaît. Puis, s’adressant aux autres voyageurs. Messieurs-Dames, si vous voulez bien avancer pour le contrôle de vos passe…

Non, mais c’est un monde ! cria fort encore le jeune homme en faisant que grands gestes avec les bras et en s’écartant. Jamais on ne m’a traité de cette façon ! Jamais, vous m’entendez ! Vous allez voir quand ça va se savoir !

Ignorant ces nouvelles protestations, la longue file des voyageurs commença à dépasser l’importun. Lui gardait la tête haute, le regard fier, et avec dédain toisait chacun des passagers qui osait le regardait. Mais les protestations des futurs passagers se tarirent doucement à mesure que la file avançait.

Pardon ! Laissez passer s’il-vous-plaît. Une femme en uniforme se fraya un passage. Chabert, qu’est-ce qui se passe ?

Entre deux contrôles d’identité, l’agent des douanes se redressa et esquissa un salut rapide du bras.

C’est ce monsieur, mon adjudant, L’ordinateur refuse de valider son passeport.

Bien. On va voir ça, répondit l’officier. Puis se tournant vers l’individu qui posait problème : Suivez-moi jusqu’à l’autre borne, s’il-vous-plaît.

Toujours contrarié, le jeune homme était tout de même ravi qu’un officier prenne le temps de s’occuper personnellement de son cas. Il emboîta volontiers le pas à l’officier des douanes. Sans le regarder vraiment, elle lui donna les mêmes instructions qu’il avait déjà reçues quelques minutes plus tôt.

Placez-vous devant la caméra, s’il-vous plaît. Bien en face. Le visage bien droit. Ne bougez plus.

Le jeune homme se plia de nouveau à l’exercice et fixa, sans sourire, la caméra devant lui. De son côté, l’officier plaça le passeport sur la borne de reconnaissance et tapa sur quelques touches du clavier de l’ordinateur. L’écran de celui-ci passa immédiatement au rouge. L’adjudant fronça les sourcils et réitéra ses instructions – Ne bougez pas s’il-vous-plaît ! – avant d’appuyer une seconde fois sur le clavier. Pour le même résultat. Sans quitter des yeux l’écran, elle expliqua :

Monsieur, l’ordinateur me dit que ce passeport n’est pas le vôtre.

C’est ridicule !

Attendez… La femme attrapa le passeport et l’inspecta en détail, avant de relever la tête et de fixer le visage du jeune homme d’un air soupçonneux. Effectivement, la photo sur ce passeport ne correspond pas du tout. Puis-je connaître votre nom, monsieur ?

Gray. Dorian Gray. Pourquoi ?